samedi 25 janvier 2014

Les conseillers généraux de Charente-Maritime disent non au projet de redécoupage des cantons


La session du Conseil général du vendredi 24 janvier, destinée à émettre un avis sur le projet de redécoupage cantonal, avait tout d’extraordinaire. Pas moins de six heures d’échanges ont été nécessaires pour que les conseillers généraux, dans leur majorité, votent un avis défavorable, tandis que 400 élus avaient fait le déplacement à La Rochelle pour suivre ce moment historique. 

Dominique Bussereau, songeur avant l'ouverture des débats, aux côtés de Béatrice Abollivier, préfet de Charente-Maritime
En préambule aux débats, Béatrice Abollivier, préfet, a détaillé le projet de décret qui prévoit la création de 27 cantons contre 51 actuellement. Une division par deux, arrondie à l’unité impaire supérieure, qui ne va pourtant pas de pair avec une baisse du nombre de conseillers généraux. À l’horizon de mars 2015, date des prochaines élections départementales avant lesquelles le décret doit entrer en application, chaque territoire sera représenté par un binôme de deux élus, obligatoirement homme et femme. Autrement dit, 54 élus devraient siéger au sein de l’assemblée départementale. Le Préfet a présenté la méthodologie retenue par le Ministère de l’Intérieur pour cette révision de la carte cantonale. Le critère principal pris en compte est démographique. Le redécoupage doit donc, selon l’État, permettre de limiter les écarts de population entre les différents cantons.

Dans le hall, les maires, avec leurs écharpes tricolores, ont suivi les débats sur grand écran
■ Des échanges à la hauteur de l’enjeu


Cette analyse n’est pas partagée par le Président du Conseil général, Dominique Bussereau, pour lequel le découpage est « très arbitraire et porte atteinte à la ruralité ». Pour lui, « à terme, les espaces ruraux seront sous représentés ». Il s’appuie sur l’exemple des nouveaux cantons rochelais, rochefortais, saintais et royannais qui compteront 12 élus, représentant 22% des voix au Conseil général pour seulement 2% de la superficie du département. Pour le sénateur Michel Doublet, c’est tout simplement « un coup de poignard dans le dos de la ruralité ».
Les élus de la majorité départementale ont relevé que « dans les départements avec une sensibilité de gauche, il y a plus d’élus pour une population moins importante, et dans les départements à sensibilité de droite, il y a moins d’élus pour une population plus importante ». Si les élus sont favorables à la parité, certains se sont interrogés sur les modalités de mise en oeuvre du binôme issu de cette réforme.
Pour la conseillère générale de Saintes-Ouest, Isabelle Pichard-Chauché, c’est « un progrès pour la démocratie » alors que l’Assemblée départementale n’a accueilli que 15 femmes en son sein depuis 1945. Jean-Pierre Tallieu, conseiller général de La Tremblade, reprend avec humour les inquiétudes sur le fonctionnement même du binôme : « un couple qui serait d’accord sur tout pendant 6 ans, cela tient du miracle ! ». Pour ce projet, c’est la parité qui a convaincu Jean- Pierre Guillon, conseiller général de Tonnay- Charente, de soutenir le redécoupage.


■ Quid du périmètre des intercommunalités ? 

 À ces inquiétudes, il faut ajouter celles concernant l’économie alors que les chefs- lieux de cantons disparaîtront au profit de bureaux centralisateurs avec, à la clé, une baisse de dotation. « Je crains que nos communes ne soient asphyxiées financièrement » s’est exclamé Jean-Claude Godineau, conseiller général de Saint-Savinien. Que deviendront les services publics ? « On ne va pas mettre les collèges et les gendarmeries sur des roulettes pour les déplacer » a rétorqué Mickaël Vallet, conseiller général du canton de Marennes et chef de file des Socialistes.
 Lors des débats, le manque de concertation avec les élus locaux est souligné. « C’est dérangeant qu’il n’y ait pas eu de débat contradictoire » a regretté Marie-Pierre Brunet, conseillère générale du canton de Surgères. Dans le cas contraire, les élus auraient pu faire part de leurs remarques.

« Je pense que c’est une erreur de créer des cantons qui ne respectent pas les périmètres des intercommunalités » constate Sylvie Marcilly, vice-Présidente du conseil général. Pourtant, selon le Préfet, le critère a été étudié, mais il intervient après celui concernant la démographie. Cependant pour Dominique Bussereau, « de telles inquiétudes sont légitimes ».

■ Avec 32 voix contre, 16 pour et 3 abstentions, le Conseil général a nettement pris position contre le projet de redécoupage. L’assemblée départementale a discuté de différents amendements dont 12 ont été adoptés. Ils visent à rendre plus cohérents certains périmètres ou à modifier des noms de cantons (ex dans le Sud Saintonge où « Les Trois Monts » sont préférés à canton de Montendre). Le Département de la Charente-Maritime espère désormais voir son avis pris en compte par le Gouvernement.


Photos Nicole Bertin

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